Après l'orage, la boue. Au lendemain de la fête nationale du 28 Octobre, la ville est en ébullition. Le député P.S. agressé par un jeune homme, a déclaré aussitôt aux médias qu'il a été “victime des partis de la gauche - plus précisément, celui de la gauche radicale (SÝRIZA), qui chauffent les esprits, permettant ces actes odieux”. Première remarque de grammaire politique à ce propos, je constate qu'enfin, un élu P.S. exprime publiquement et avec véhémence, implicitement certes, la non appartenance de son parti à la galaxie de la gauche. Nous en Grèce nous le savons, il est peut-être temps, qu'en France notamment, les médias se remettent de la désinformation -volontaire ou non- qui consiste à présenter les candidats P.S. comme étant de la gauche. Pour ce qui est du fond de l'affaire maintenant, si vraiment les partis de la gauche avaient vraiment la capacité de chauffer les esprits dans ce pays, on aurait vu la révolution d'octobre sous les Cariatides. Mais ce n'est pas le cas.
Prenant un café en ville j'ai remarqué qu'on ne parlait pas d'autre chose. A la table voisine un homme la soixantaine bien habillé, donne à son interlocuteur son point de vue. “Mangoúfis, notre député P.S. dit n'importe quoi. Le type qui l'a agressé est un jeune militant P.S., jadis on lui avait trouvé un job, maintenant il est au chômage, voilà tout”. Puis, les deux interlocuteurs passent à autre chose. “Tiens, as-tu vu en face, ce café ? Il a fait faillite après l'été, non ? Des foutaises, le café était le prétexte, en réalité ses tenants pratiquaient le blanchiment d'argent. Ils l'ont ré ouvert à la ville voisine. Comme le concessionnaire BMW de notre ville. Après avoir escroqué le fisc, la douane, la maison mère en Allemagne et ses clients ici, il a fait faillite et il se cache. Tout va être saisi. Et alors? Son fric est en Suisse, on parle de dix millions d'euros. L'été dernier encore, il a été reconnu dans îles sur son yacht. Il l'a acheté plus de sept cent mille euros....”. Que croire des ragots dans les cafés ? En tout cas, le café grec ou turc laisse du marc. Et ce marc peut servir à nettoyer les canalisations, jusqu'aux égouts politiques.
Le soir même, l'agression du député devient une affaire nationale. L'agresseur fait des déclarations publiques, y compris sur le net, Tríkalanews.gr. Il était membre du P.S., candidat (non élu) sur la liste du maire “socialiste” de la ville aux dernières élections. Photos à l'appui. Son positionnement ne laisse aucun malentendu: “Je dois souligner que cette attaque est liée à la très mauvaise politique du P.S. (PASOK), je considère qu'il s'agit d'une trahison. C'est une politique qui anéantit le peuple et qui brade le pays. Le député en question n'a pas été visé en sa personne, j'aurais pu attaquer n'importe quel autre député qui a paraphé l'accord entre la Grèce et la Troïka. En plus, je dois ajouter que Monsieur Mangoúfis (l'élu P.S.) je le connais, comme je connais tous les élus P.S. du département, puisque je suis membre de la jeunesse de ce parti depuis 2008 (...) Ce représentant n'a pas compris que le peuple bat le pavé délaissant désormais les cartes des partis. Nous en plus, les anciens du P.S., nous nous sentons comme les plus trahis en Grèce par ces gens, on nous mène encore en bateau. Nous avons donné nos luttes et eux, ils ont capitalisé le pouvoir et ses privilèges. Les besoins de la vie et l'avenir impossible des citoyens ne les intéressent pas du tout (...) Mon acte a été motivé par ma situation. Je suis au chômage depuis des mois et mon épouse est enceinte. Notre enfant va naître d'ici quelques jours et dans ma poche il n'y a plus un seul euro. Je suis responsable devant ma famille et je n'ai aucune possibilité de travailler. Voilà qui suis-je, les appartenances partisanes n'intéressent plus, comme pour les autres grecs, ce qui importe désormais est le soutien et la survie de nos proches”.
Donc voilà pour le “mystère” de l'agression. En deux ans de gestion Papandréou, les partisans inscris même au P.S. se retournent contre le système, adoptant des comportements dignes des mauvais supporteurs d'Olympiakós ou du PSG. Ce n'est pas du hooliganisme comme le suggèrent ce lundi encore les déclarations du monde politique normatif, y compris celles du Président de la “République”. Après avoir mis le feu aux poudres, les politiques dénigrent maintenant les conséquences. Mais de l'agriculture sur brûlis social, on peut tout récolter. Y compris l'impensable. Chaos, révolte ou mort lente?