Greek Crisis
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Tuesday, 17 December 2013

Au pays de la dette odieuse/In the land of odious debt



Le temps se croit festif. Je remarque que cette année, nombreux sont ceux qui... se réinventent, d’ailleurs non sans effort pour ce troisième Noël du temps de crise. Déjà, il y aurait davantage de décorations que les autres années, et quant aux commerçants rescapés, ils espèrent alors le miracle final durant les fêtes. Il y a sûrement grande foule au centre-ville ces dix derniers jours, sauf que souvent, ce n’est qu’une promenade... plus soutenue que d’habitude.

Les étudiants chantent Noël. Athènes, le 15 décembre

L’ouverture des magasins certains dimanches désormais imposée récemment par décret “d'en haut”, a ainsi libéré les esprits et autant les... mains visibles ou désemplis du marché, sans même parler des pieds ni du bourbier dans lequel ils se sont mis. Dimanche 15 décembre rue Hermès il y avait alors du monde, autant pour admirer les musiciens de rue et notamment une bande formée d’étudiants à l’Université d’Athènes. Ces derniers interprétèrent certains morceaux traditionnels de Noël, chants des îles ou rythmes de Thrace et d’Épire. Indiscutablement, la tradition passerait plutôt bien en ce moment et pour cause.

Samedi 14 décembre, notre mouvement “Enotita 2012”, (“Unité 2012”), a organisé sa dernière manifestation de l’année 2013. Une soirée, consacrée à l’histoire du Pirée à travers le chant Rebetiko. Notre ami Panagiotis Kounadis, spécialiste du Rebetiko a exposé le cadre historique, ainsi que les évolutions à partir certaines dates, 1922 ou 1941, tant au niveau des instruments, qu’à travers la sociologie des hommes et des lieux.

Panagiotis Kounadis. Athènes, le 14 décembre

Panagiotis, a également annoncé officiellement, la relance de l’Association des Amis de la Musique Grecque (“Syllogos Filon Ellinikis Mousikis - SFEM”), ce fut une pépinière extraordinaire de jeunes musiciens, paroliers, poètes, écrivains et artistes entre 1962 et 1967 pout toute cette dernière génération extraordinaire de l’avant-junte des Colonels.

Parmi nos amis présents, Spyros Ornerakis, connu pour ses dessins de presse notamment, et qui ne se fait guère d’illusions: “Tous ceux, encore capables de création quelconque, porteuse d'avenir et de projet professionnel quittent alors le pays par milliers. La Grèce est assassinée”. Dans la foulée, Natalia digne représentante de la génération des trentenaires au sein de notre “Unité 2012”, a annoncé sa décision: “Trop fatiguée, je jette alors l'éponge. Dégoutée de cet univers de la survie et du négatif triomphant, je pars. En ce moment, je prépare mes papiers. Après les fêtes je vais rejoindre mon frère et sa compagne à Dubaï. C’est terminé...”.

Natalia et le Rebetiko. Athènes, le 14 décembre

Nous nous sommes regardés durant une pause et entre deux morceaux de Rebetiko... et de la Grèce. Parmi nous, Yannis, artiste céramiste ayant vécu plus de trente ans à New York. Fondas Ladis, notre ami écrivain, interrompit alors le silence: “Le sort de ce pays est ainsi scellé, c’est fort connu. Il y a ceux qui partent, puis, ceux qui reviennent après un si long périple pour vivre ici, ou pour ne pas mourir ailleurs”.

Car la guerre économique que nous respirons nous transforme en victimes éventuelles et imminentes, dans un sens, elle nous libère en quelque sorte du monde d’avant ainsi que de son modèle anthropologique, parfois malgré nous. Et de toute manière, nous irons jusqu’au bout. Pour Fondas, Spyros, Panagiotis (Kounadis) et leur génération, le processus sera long, trop long même. “Nous portons notre culture comme si nous portions des armes, en cette nouvelle guerre de libération. Les événements politiques, les syllogismes collectifs feront le reste et peut-être, bien... après nous”.

Spyros Ornerakis (à gauche) et Fondas Ladis. Athènes, le 14 décembre

La surprise de la soirée fut la découverte de Vassiliki Tzakhrista, archéologue et virtuose du bouzouki. C’est rare dans un genre musical où la présence féminine très fréquente certes, ne pénètre pas cet univers de l’interprétation si particulier jusqu’à la transe, autrement que par la voix.

La Grèce, ses univers et ses voix... jusqu’à l’épuisement. Le coût de l’entrée pour cette soirée avait été fixé à trois euros par personne. Ensuite, et pour ceux qui le désiraient, il était possible de boire un verre de vin pour deux euros et de grignoter assez correctement pour quatre euros. Comme très souvent depuis deux ans, le prix du possible partagé se trouve désormais fixé entre cinq et jusqu’à dix euros par participant. Lorsqu’on peut encore à se payer une consommation ou un spectacle bien entendu.

Car d’après les derniers chiffres sur la crise néo-humanitaire grecque, plus de 70% parmi les Grecs pauvres, n’arrivent plus à subvenir à leurs besoins les plus élémentaires, tandis que 30% de la population et qui ne serait pas encore considérée sous le seuil de pauvreté, éprouve les mêmes difficultés de manière occasionnelle.

Des médecins racontent combien il devient alors fréquent pour les plus démunis que de se faire passer pour les parents de leurs patients afin de parvenir à passer la nuit dans un hôpital, c'est-à-dire bien au chaud et si possible, jouissant de certaines rations de nourriture. D’autres désespérés, s’adressent à l’hôpital psychiatrique de Dafni près du Pirée, pour implorer les médecins mais apparemment en vain, dans le but de se faire admettre en malades mentaux et ainsi... bénéficier d’une hospitalisation, c'est-à-dire, d’une prise en charge pour ce qui est de leur nourriture et de leur résidence, même pour quelques mois, d’autant plus, ceux de l’hiver (Real-FM du 16 décembre).

Athènes, le 15 décembre

Athènes compte déjà 30.000 sans-abri, tandis que de nombreuses personnes ne se lavent plus régulièrement, faute de chauffage. Un pope a témoigné auprès le journaliste Yorgos Trangas que lui-même, ainsi que d’autres membres du clergé, s’adressent désormais aux hôteliers proches de leurs paroisses, pour que ces derniers, acceptent d’offrir les sales de bain de certaines de leurs chambres inoccupées durant l’hiver, les laissant à la disposition des nombreux exclus du lavage complet, “car dès lors, c'est une insupportable atteinte à la dignité humaine qu'il va falloir combattre” (Real FM au 16 décembre).

Yorgos Trangas qualifie cette situation de “génocide économique” et il n’est d’ailleurs pas le seul à s’exprimer ainsi dans ce pays. En tout cas, les participants... et d’ailleurs tous progressistes à la soirée du Rebetiko, avaient remarqué aussitôt après à même le trottoir, rue Panepistimiou, le nombre de ceux qui enveloppés dans une couverture tentèrent à s’assoupir, ou sinon, tout simplement à ne plus rester trop éveillés dans un tel monde sans musique. De toute évidence... le progrès humain consiste à réaliser toutes les choses possibles.

L'Orange Mécanique. Athènes, le 16 décembre

En tout cas, et c’est encore pour une question d’époque que l’Orange Mécanique d’Anthony Burgess est en ce moment adapté au théâtre à Athènes. Par une autre... mécanique toujours d’époque, une certaine presse et qui se prétend de l’unique... pureté historique ; revient alors sans cesse sur certaines figures du passé, d’autant plus que notre présent est sur le point de s’effondrer.

Une certaine presse historique et les figures du passé. Athènes, décembre 2013

N’empêche, les rues marchandes du centre-ville imperturbables en apparence, sont bien fréquentées car le temps serait enfin festif. Sauf que tout a changé. Et d’abord le contexte, comme par exemple à travers cette petite écriture sur une petite pancarte, accrochée à l’arbuste dans la rue la plus historiquement marchande de la ville: “Il faut collectionner les moments plutôt que les biens”.

Puis, dimanche 15 décembre sur la place de la Constitution (abolie), quelques ressortissants Ukrainiens manifestaient leur ardente envie d’appartenir aussi à l’Union européenne. “Ils n'ont rien vu ces gens, ils n'ont rien retenu de notre expérience en Grèce ou quoi ? Nous, nous nous disons que désormais il va falloir quitter le navire et eux, ils s'apprêtent à monter à bord maintenant qu'il est en train de couler”, dit alors une femme relativement âgée et personne n’a voulu la contredire, ni en rajouter d’ailleurs. La Grèce entière et en mille morceaux, entre attentes et mutismes.

“Il faut collectionner les moments...” Athènes, le 15 décembre

Ukrainiens adeptes de l'Union européenne. Athènes, le 15 décembre

Près de la place, un bouquiniste du coin était en train de brader certains titres: “Bruxelles”, “Beethoven”, “Histoire Universelle” et “La Grèce au sein de l'Union européenne”. L’histoire ne se répétera pas, cependant la nouvelle musique se fait bien entendre à travers l’Europe.

Et quant aux petites histoires de la difficulté ou de la renaissance quotidiennes, sur le marché central de notre ville, le beau poisson était presque inaccessible au plus grand nombre, à 26 euros le kilo, tandis que juste en face, une nouvelle boutique venait d’ouvrir ses portes à l’emplacement d’un disquaire qui avait fait faillite seulement après quelques mois de mémorandum-premier, en automne 2010. La nouvelle enseigne à l’instar du plus grand nombre des commerces nouveaux, vend de l’alimentaire, plus précisément, des produits crétois.

Chez le bouquiniste. Athènes, le 15 décembre

Sur le marché central. Athènes, le 14 décembre

Nouvelle épicerie. Produits de Crète. Athènes, le 14 décembre

Sur la place de la Constitution il y avait donc foule. Les Ukrainiens étant partis, un petit groupe d’étudiants appartenant à la jeunesse du KKE (le PC grec), tentait de rappeler que leur parti fête alors ses 95 ans. “Nous poursuivons derrière le même étendard jusqu'à la victoire”... et plutôt dans l’indifférence.

Nous poursuivons derrière le même étendard”. Athènes, le 15 décembre

Après avoir collecté suffisamment de moments à travers notre splendide hétéroclite, il est encore possible de prendre son café dans un minuscule trou, une vieille buvette à l’ancienne, à condition que le cafetier veuille bien servir. Par loin et au moment où le scandale du corrupteur Siemens serait paraît-il définitivement enterré par la justice grecque, un graphisme de rue, rappelle ce lien initiateur des temps nouveaux, lien alors suggéré entre Siemens, la Troïka et notre État-policier méta-démocratique gouverné par la dette odieuse.

Vieux café. Athènes, décembre 2013

Dans l’actualité de cette semaine déjà, figure le scandale des “Alvarez and Marsal”, “Black Rock”, “Oliver Wyman”, “Pimco” et des autres conseillers de la Troïka derrière le mur de leur argent qui entoure notre univers concentrationnaire (hebdomadaire “To Pontiki”), et encore celui l’argent noir “libre d'impôt” de certains députés, surtout Pasokiens et de la Nouvelle démocratie, d’après ce, que du patrimoine des élus vient d’être publié officiellement lundi 16 décembre.

“Ils méritent la mort”, s’est exclamé un auditeur indigné, joint par téléphone depuis le studio de la radio Real-FM (16 décembre), sans autre commentaire. Il était alors une fois un temps, le plus festif qu'on eût su voir au pays de la dette odieuse.

Siemens et la Troïka. Athènes, le 15 décembre




* Photo de couverture: Vassiliki Tzakhrista archéologue, au bouzouki. Athènes, le 14 décembre