Au pays de la carte-postale, les plus jeunes des visiteurs d’Épidaure ne sont pas déçus, surtout en ce moment. Le célèbre site, définitivement déserté des autocars dits de tourisme, accueille à peine plus de voyageurs curieux qu’en juillet. Le calme qui règne dans les lieux est inhabituel et reposant, pour le petit bonheur des enfants comme des incontournables animaux adespotes. Pays ancien, pourtant sous de nouvelles tempêtes.
Au pays de la carte-postale. Nauplie, août 2020 |
On a beau fredonner depuis la scène pour être entendu, surtout dans le but de tester pour la millième fois l’acoustique du théâtre, tel un acteur situé sur la scène qui peut être entendu au dernier rang, à une distance de près de 60 mètres ; rien n’y fait. Le cœur n’y est plus. Les visiteurs, plus furtifs que jamais, déambulent à travers les vestiges d’Épidaure désormais sous la hantise des nouvelles distances socialement requises, règles sans cesse rappelées. “S’il vous plaît, pas plus que dix visiteurs à la fois à l’intérieur du musée, attendez votre tour dans la file d’attente en face de l’entrée”.
Enfin, le Festival d’Athènes et d’Épidaure est à son tour annulé, tel est le sort des manifestations encore culturelles en cet août finissant. Les masques sont tombés et ceux du théâtre avec, c’en est donc fini d’Aristophane à Épidaure.
Toutefois et à vrai dire comme peu de choses nous consolent en ce moment, voilà qu’enfin les fouilles s’y poursuivent, elles ont été entreprises il y a près de deux ans au niveau de la Thólos, temple bien rond, fait de marbre blanc, une œuvre de Polyclète le Jeune datant du milieu du IVe siècle av. J.-C. Pour faire court, on dira seulement que la Tholos fut le lieu où étaient conservés les serpents sacrés du dieu guérisseur Asclépios, édifice alors de caractère éminemment chthonien.
Épidaure, le théâtre. Août 2020 |
On a beau fredonner depuis la scène. Épidaure, août 2020 |
Les fouilles au niveau de la Thólos. Épidaure, août 2020 |
Et pour ce qui est des dieux chthoniens, ceux du monde souterrain ou des Enfers, par opposition diachronique aux divinités célestes, le pays est de toute évidence... toujours bien servi. En somme, ceux qui en savent bien de choses parmi les journalistes, attitrés ou pas, nous préviennent déjà des “catastrophes” en cours. Notamment, l’accord secret qu’aurait conclu la classe politique grecque avec la Turquie, “histoire de faire reculer la souveraineté de notre pays sur 28 îles de la mer Égée, mettant ainsi entre parenthèses le droit international existant”.
“On aura compris à l’occasion qu’au Sommet européen extraordinaire du jour, la Biélorussie précède et de beaucoup la crise gréco-turque, ce qui démontre une fois de plus combien l'Occident à travers l'atlantiste Merkel, prescrit le renversement du pro-russe Loukachenko pour ensuite déployer les forces de l'OTAN dans la cour de Poutine. Comme en Ukraine.” Pour faire court, j’y ajouterais ce... cheminement logique désormais avéré: Allemagne, Etats-Unis, Sóros, CIA et alors Geoffrey Pyatt.
“Le même plan s'applique plus au sud. Si une zone dite neutre est créée en mer Égée et que le nouveau canal d'Istanbul est construit en contournant de la sorte les termes du Traité de Montreux, les navires américains, à la fois commerciaux et de guerre, atteindront alors la mer Noire. D'où l’intérêt des États-Unis pour le port stratégique d'Alexandroúpolis situé au N-E de la Grèce. Ils veulent ceinturer Poutine dans sa cour, puisque la Russie est désormais présente au Moyen-Orient. L'éternel problème depuis le temps de Kapodístrias.” Notons que Kapodístrias, le premier gouverneur choisi par les Grecs avait été assassiné en 1831 à Nauplie par ceux qui ont été les instruments des Puissances occidentales, histoire de tuer dans l’œuf toute indépendance grecque qui se tournerait d’emblée vers la Russie.
“Et alors maintenant que peut-il se passer ? Afin d'empêcher pour un certain Occident, une nouvelle descente de la Russie vers la Méditerranée et le Moyen-Orient, nous devons alors accepter que notre île de Kastelórizo devienne une zone grise, et que l’Égée puisse être proclamée mer neutre, comme le professeur Mázis l'avait d’ailleurs prédit en nous prévenant du danger dès 1997. La couleur de notre souveraineté sera alors bleu pâle, et nous mettrons l'intégrité territoriale des îles en péril rien qu’en les désarmant. C’est un prix très lourd pour une tranquillité bien temporaire! Que ceux qui veulent imposer cet accord, gardent enfin tout cela à l’esprit”, Manólis Kottákis, 18 août 2020.
Bâtiments turcs au large de Nissiros. Photo, Olivier Delorme, août 2020 |
Bâtiments turcs au large de Nissiros. Photo, Olivier Delorme, août 2020 |
Le KEMAL REIS endommagé. Presse grecque, août 2020 |
On a beau enfin publier les photos de la frégate turque KEMAL REIS, sérieusement endommagée après être tombée dans le piège qu’elle a voulu tendre à la frégate grecque LIMNOS ; les navires turcs provoquent toujours et sans cesse en mer Égée, elles ont par exemple été photographiées au large de l’île de Nissiros par mon ami Olivier Delorme, dont l’analyse de l’impérialisme islamiste de la Turquie est fort juste. Mer Égée, pourtant celle de civilisation et de cheminements grecs depuis la plus haute antiquité, comme le démontrent entre autres les pièces retrouvées sur l’émouvant site Mycénien d’Asíni en Argolide. Chypre, Kastelórizo, Rhodes, Karpathos, la Crète, Cythère, Argolide.
“Or, dans la montée de cet impérialisme, l’Union européenne porte une écrasante responsabilité. Pourquoi lors des marchandages budgétaires a-t-on contraint la Grèce à lever son veto à la candidature de la Turquie sans exiger de celle-ci qu’elle accepte l’arbitrage de la Cour de La Haye ? Pourquoi les milliards d’euros du contribuable européen déversés sur la Turquie au titre de la pré-adhésion, de la réalisation de l’union douanière puis du chantage aux migrants n’ont-ils jamais eu pour contrepartie la cessation des continuelles violations de l’espace aérien grec et l’évacuation de 37 % du territoire de la République de Chypre, membre de l’UE, occupés et colonisés depuis 1974 ? Pourquoi l’UE a-t-elle imposé qu’une partie des fonds européens destinés à Chypre finance l’État fantoche qu’y a proclamé Ankara ?”
Asíni et le monde grec. Août 2020 |
Asíni et le monde grec. Août 2020 |
“Pire, cet argent a permis la consolidation du pouvoir d’Erdogan en finançant, via des commissions sur les marchés publics, le système de charité islamiste du parti AKP. Et l’UE refuse toujours de mettre fin à la sinistre comédie des négociations d’adhésion de ce pays dont le régime ne tient plus que par la répression, la censure et la fraude électorale. Alors que, depuis dix ans, elle impose à la Grèce une ravageuse déflation, qui a notamment provoqué l’exil de 500.000 Grecs, affaiblissant ce pays de 10,7 millions d’habitants face à l’impérialisme d’un voisin de 82 millions à l’armée notablement plus puissante - au moins sur le papier. Rarement aveuglement géostratégique aura été aussi complet !”
“Lorsque le parti islamiste AKP arrive au pouvoir en 2002, son mot d’ordre est: zéro problème avec les voisins ; la Turquie est aujourd’hui en conflit plus ou moins larvé avec tous. Elle a soutenu Daesh, blanchi l’argent de son pétrole, tiré dans le dos des Kurdes. Elle a recyclé en supplétifs ce qui reste des terroristes de Daesh et Al Qaïda pour les disséminer en Libye, dans le Caucase où l’Azerbaïdjan, poussé par Ankara, ranime la guerre contre l’Arménie - probablement aussi parmi les migrants, peu aujourd’hui sont des réfugiés, qu’elle a lancés à l’assaut des îles ou de la frontière terrestre grecques”, Olivier Delorme dans “Marianne”, 17 août 2020.
Vue depuis le site d'Asíni, 1926 |
Même vue depuis le site d'Asíni, août 2020 |
Accessoirement on aura enfin compris que c’est autant à travers... la carte-postale de la géopolitique actuelle que le prétendu couple franco-allemand relève à son tour du canular. Bonne blague !
“En effet, les tensions actuelles en Méditerranée orientale révèlent la crise profonde du couple franco-allemand. Ainsi, alors que Paris est en plein bras de fer avec le Président Erdogan, l’Allemagne a mis sur le même plan, d’une part, les Grecs - qui sont pourtant les agressés - et leurs alliés Français et, d’autre part, les Turcs, appelant toutes les parties à éviter l’escalade”, “Le Figaro”, 19 août 2020.
Au pays de l’autre carte-postale, on sait que comme en Ukraine ou en Biélorussie, l’Allemagne, les Etats-Unis, Sóros, la CIA sont de la partie. D’ailleurs ; Geoffrey Pyatt, Ambassadeur des Etats-Unis à Kiev au moment des faits en 2014, a ensuite été nommé en 2016 en poste à Athènes. Ceci explique aussi cela... plus l’actuel coronavirage, mondial comme européiste.
Car pendant que le Mitsotákis y ajoutera comme programmé, la pierre finale à la tombe de la Grèce, le peuple de nouveau confiné ou même vacciné d’office par les conspirationnistes officiels, croira peut-être que son grand souci n’est alors autre que le retour, réel ou surfait du gros méchant coronavirus. Et ce n’est naturellement pas l’existence de la maladie qui est niée, mais plutôt les intentions des dirigeants et des autres pantins actuels. Car toute une mécanique sociale de grandeur colossale est en marche en ce moment, les médias chiens de garde terrorisent les Grecs à ce sujet alors que les très nombreux cas détectés dans les îles et dans les lieux touristiques sont occultés par les gouvernants.
Même la presse en parle, c’est pour dire. Seulement voilà, dans les piètres décomptes de la maladie, on mélange par exemple volontiers les malades et les porteurs asymptomatiques, comme on interdit aux agents hospitaliers de s’exprimer devant la presse sous peine de sanctions. D’après leur syndicat, 70 médecins hospitaliers grecs sont en ce moment porteurs du COVID-19, parmi eux, 50 restent à ce jour asymptomatiques.
Nauplie, ville... presque morte. Août 2020 |
Fermeture définitive. Nauplie, août 2020 |
La Dormition de la Marie - mère de Jésus. Nauplie, août 2020 |
D’après l’équipe du Pr Ioannídis de l’Université de Stanford, l’article m’a été signalé par l’ami Jean-François et je le remercie, “les mois écoulés auront vu le monde vaciller devant une épidémie respiratoire virale d’un ordre de grandeur pourtant habituel, avec des réactions sanitaires, sécuritaires et politiques sans précédent. Si, étant donné les incertitudes qui existaient quant à la gravité de la Covid-19, ces réactions ont pu sembler justifiées dans un premier temps, il a vite été évident que ce n’était pas le cas. Les autorités, OMS et gouvernements occidentaux en particulier, ont sur-réagi d’une manière terriblement destructrice à long terme pour nos sociétés”.
Au pays de la carte marine, on s’apprête à “assécher sa mer”, pour mieux s’accaparer ses îles comme ses terres libérées en 1821 de la barbarie turque. Le tout, sans la moindre légitimité politique, voire contre les intérêts les plus fondamentaux de la nation. C’est une question de vie et de mort, sauf qu’à travers les télévisions poubelles, on dessinera plutôt la prétendue carte sanitaire du COVID-19 au lieu de notre propre carte marine.
Ioánnis Kapodístrias, assassiné à Nauplie. Août 2020 |
Pendant ce temps, et d’ailleurs déjà en cet été 2020, des troupes américaines ont été débarquées par milliers, ainsi que du matériel important, le tout sans faire trop de vagues dans les médias. A Alexandroúpolis en Grèce, mais aussi en Allemagne et sur le port de La Rochelle en France. Mais on n’aura presque rien vu. Du confinement à la déconfiture organisée le chemin n’est guère trop long.
Dans la foulé, la Junte Mitsotakiénne terrorise et achève même les petits commerçants et d’abord les tenants des bars et cafés comme récemment à Nauplie. 17.000 d’euros d’amende ont frappé certains établissements pour des supposées effractions aux règles austéritaires sanitaires. L’économie grecque restante doit mourir, pendant que tous les commerces ouvriront désormais chaque dimanche durant toute l’année au centre-ville d’Athènes et pas seulement. Les employés restants... apprécieront.
Asíni, paysage. Août 2020 |
On arrive donc à un point de non-retour, d’ailleurs imposé. Ma réponse au questionnement de mon ami Olivier Delorme à propos de “l’impertinence légendaire de l’UE et de son aveuglement géostratégique” dans le dossier turc, et en à l’état actuel des choses vu... la déconfiture actuelle grimpante, tient alors à un premier constat, issu du moins de ce que l’on sait.
Derrière les institutions européistes et ce n’est qu’un exemple, une Junte autant mondialiste que techno-féodale prépare la fin du monde, du nôtre pour ne rien cacher. Les pantins qui gouvernent ont largement moins d’autonomie que jadis, sauf que les peuples se réveillent et se révoltent. L’UE n’a jamais été ce qu’elle semble prétendument incarner, la démocratie à l’occidentale d’ailleurs non plus. Et bien naturellement, la géopolitique s’occupera comme toujours du reste. Seules les nations conscientes des dangers comme des enjeux survivront, au besoin en passant par un bain de sang...
Au pays de la carte-postale, seuls les plus jeunes visiteurs d’Épidaure comme ceux d’Asíni ne sont guère déçus, et ceci surtout grâce aux animaux adespotes des lieux.
Visiteurs et animaux. Asíni, août 2020 |
De la carte-postale à la carte géopolitique... tout un monde !
Animal adespote des lieux. Asíni, août 2020 |
* Photo de couverture: Les plus jeunes des visiteurs d’Épidaure. Août 2020